Promenez-vous dans Sathonay-Village, prenez le temps de flânez et (re)découvrez le patrimoine de la commune.

Histoire de la salle des fêtes

Article paru dans la Gazette de Sath’nâ n° 11.

C’était par un matin d’hiver de l’année 1955…
Un tracteur emmène sur sa remorque, une équipe de bénévoles en direction de la route de Vancia, et s’arrête au niveau des grands murs. Jeunes, moins jeunes, paysans, maçons, charpentiers, membres du sou des écoles ou sapeurs pompiers, s’apprêtent à commettre … le vol du siècle !

Il fait froid, la route est glissante et la neige recouvre encore champs et talus. Sur leurs lèvres, le goût de la gnôle que l’épouse du propriétaire du tracteur vient de leur offrir, leur donne du courage.
Quand on nait honnête, et que l’on reçoit l’éducation des braves gens, ce n’est pas sans quelque angoisse que l’on s’apprête à enfreindre le 7ème commandement. Le but de l’expédition et l’ardeur qui les anime balayent tout scrupule. Au travail !

On décharge les outils, échelles, cordes, broches, masses. Les maçons s’attaquent au mur qui retient prisonnier l’un des derniers fers convoités.

« Ce long mur fût construit par l’armée pour servir de pare-balles durant les tirs réels au champ de tir de la Villotière. Lors des exercices, les militaires faisaient glisser sur des rails, de lourds et épais portails de chêne, pour fermer les entrées permettant d’accéder aux champs, que les agriculteurs abandonnaient, alertés par le clairon. Un jour, il n’y eut plus de tirs réels et durant la dernière guerre, les portails s’émiettèrent en bois de chauffage. Des fers disparurent, il n’en restait plus que deux … »

Nos spécialistes viennent d’en desceller un. Encore un petit effort, et, dans un bruit sourd et mat, il tombe sur la neige qui, complice, amortit le choc, mais qui tout à l’heure peut devenir traitre en révélant le trajet des coupables.

Le rail est hissé sur la remorque, il est si long que son poids la fait se redresser. Les jeunes doivent s’asseoir à l’avant de l’attelage pour faire contre-poids.
Ça y est, l’équilibre est obtenu, le deuxième fer sera attaché à la remorque et trainé sur le sol. Le cortège s’avance au pas, en direction de la salle des fêtes, ou plutôt des écuries du château, car c’est là leur destination.

Pour comprendre cette curieuse opération, il faut remonter quelques années en arrière. A l’automne 1950 une jeune institutrice, madame PANISSIERES s’installe au village. A Noël, elle organise un petit spectacle dans sa salle de classe (aujourd’hui salle de séjour de la maison Moyennin). Les parents s’entassent dans les coins, l’estrade sert de scène et les saynètes jouées par les élèves se déroulent autour du grand poêle à charbon. C’est le succès !

On ne peut en rester là, il faut encourager cette initiative. Les parents raniment le Sou des Écoles en sommeil depuis la guerre, et constituent un bureau : président d’honneur Louis DANIS, président Emile GAY, vice-président Louis PANISSIERES, secrétaire Marguerite PANISSIERES, trésorier Benoit BERNARD suivis par une équipe de jeunes parents pleins d’enthousiasme et d’idées. La prochaine fête doit se dérouler dans une salle plus grande : Il faut aussi faire un bal pour renflouer la caisse !

Sathonay-Village n’avait pas de salle des fêtes. Nombreuses communes environnantes en avaient construit une avant la guerre : Sathonay-Camp, Rillieux, Fontaines, Cailloux. Il est vrai que Madame de BERNIS mettait la remise de ses écuries à la disposition de la paroisse pour y faire des fêtes, et Madame CHOSSET la remise de son café pour le bal des Pompiers à la Sainte Barbe. La vogue se déroulait l’été sur la place, il n’y avait pas d’autres manifestations.

NOEL 1951, la fête a lieu dans une grande remise, 2 rue Louis Burdin, avant son aménagement en menuiserie. C’est alors que la municipalité envisage d’acquérir « Le Grand Sathonay », château qui a appartenu aux familles de BERNIS et de SAINT GUILHEM et qui est la propriété des allocations familiales. C’est une dépense énorme pour notre commune sans ressources.
Elle contracte un emprunt et racle les fonds de tiroirs. La vente est signée début 1953. Il ne reste pas un sou pour entreprendre des travaux.
Durant les longues démarches administratives et financières, le vendeur permet d’occuper les lieux et la fête de NOËL 1952 se passe dans la remise des écuries où une scène est installée côté ouest. La paroisse donnera aussi une fête au mois d’avril, chaque année dans ce local trop exigu.

MARS I951, pour la première fois le Sou des écoles organise un grand bal masqué dans les salons du château (suivi d’un autre en 1953 et 1954). Là aussi, la place est réduite et à la rentrée d’octobre 54, la création d’une classe dans ce qui est aujourd’hui le secrétariat et qui servait de buvette lors des bals, oblige les habitants de Sathonay-Village à prendre une décision : il faut faire une salle des fêtes dans les écuries du château.

Sous la paternelle protection du Maire Louis DANIS, et la direction d’Emile GAY président du sou des écoles et Benoit BERNARD Lieutenant des sapeurs pompiers, les travaux vont commencer !
Démolition des bas-flancs, crèches, râteliers, et des gros murs qui partagent le bâtiment en plusieurs salles: remise, écurie, sellerie, réserve. Ces murs qui soutiennent le plafond et la toiture doivent être remplacés par de gros fer porteurs. Le fer est cher et rare, et il y en a 2 beaux …

Le commandant du camp de Sathonay reçoit les délégués du Sou des écoles avec beaucoup de compréhension, mais hélas, ne peut leur donner satisfaction. Il faut une demande écrite et passer par la voie hiérarchique. En admettant que Paris accepte de donner ces fers, il faudra bien attendre la réponse 6 mois. Impossible ! Le bal masqué doit avoir lieu dans quelques semaines. Le commandant laisse entrevoir la solution que vous connaissez et leur précise : « Il est évident que si ces fers disparaissent sans laisser de trace, cette conversation n’aura jamais eu lieu … »

La suite ? Des heures et des heures d’effort pour arriver au but tracé. Le fer est trop long ! Aujourd’hui en quelques minutes, une meuleuse en aurait raison, en 1955 on fait appel à un maréchal ferrant de Rillieux qui fabrique un outil pour le couper. Le mettre en place sera le plus périlleux moment de l’ ensemble des travaux.

La commune achète un parquet pin 1er choix, il sera entièrement posé par les bénévoles. La future salle des fêtes est un chantier permanent. Certains veillent tard le soir, d’autres , travaillant de nuit viennent quelques heures dans la journée. Le parquet doit être terminé pour le bal masqué.
Quelques morceaux de jute fixés au mur donnent un air propre et chaleureux.

En fait de chaleur, le thermomètre est au plus bas en cet hiver 55 et les derniers jours on essaie de le faire remonter à l’aide de poêles à alcool et à charbon. On fait passer les cornets par le haut des portails où il manque des vitres. La sécurité commande de 1es retirer juste avant le début de la fête. Après … L’ambiance et la buvette prendront le relais.

Tout fût enfin prêt à l’heure « H ». Ce fût un bal magnifique et malgré leur fatigue, tous les artisans de cette construction passèrent une soirée inoubliable. Quelle satisfaction, quelle fierté les habitaient ! Ils s’en souviennent encore … et surtout, si vous parlez de la salle des fêtes devant eux, ne dite pas qu’elle est trop longue, trop étroite, qu’elle ne ressemble pas à une salle des fêtes, même si cela est un peu vrai, vous ne leur feriez pas, mais vraiment pas, plaisir.

Au fil des années, et quelquefois encore avec du bénévolat, elle fût améliorée : un plafond en isorel perforé, de la peinture aux murs, une scène sur tréteaux, des décors (peints gracieusement par un artisan de Fontaines), un rideau confectionné par les épouses, des portails pour remplacer ceux qui ne supportaient plus d’être ouverts ou fermés, une scène en dur, des rampes d’éclairage , un autre plafond en brique ( qui ne valut pas 1e premier en matière de sonorité, mais sécurité oblige !) , le chauffage central, l’aménagement de la buvette, la sono, encore un plafond pour une meilleure acoustique et puis, tout récemment cette magnifique fresque réa1isée par les enfants des écoles (et par leurs enseignants) , hommage, sans le savoir, à tous ceux qui, en pensant aux enfants et à la jeunesse de leur village, s’étaient surpassés dans le travail et l’amitié pour réaliser « une salle des fêtes ».

Quand au délit de vol, il y a prescription, mais si la sentence de 100 Bals avait été appliquée, elle serait aujourd’hui purgée. Le Sou des Écoles, les Sapeurs Pompiers et leur Clique, et les autres sociétés, ont fait valser plus de 1OO fois les Sathonards depuis I955.

A toute histoire, il y a une morale, et pour celle-ci, la municipalité prouva sa reconnaissance au sou des écoles, en l’exonérant à perpétuité du paiement d’une location lors de ses manifestations à la Salle des Fêtes.

Remerciements à l’association Sath’nâ pour leur aimable autorisation de reproduction.

Cave à neige ou glacière

Article paru dans la Gazette de Sath’nâ n° 11.

A la construction du château communal de Sathonay-Village, en 1870, un réservoir à froid fut installé en dehors du bâtiment et enterré, avec accès à ce volume par les caves.

Trois portes isolantes fermaient le sas et le réservoir à neige, pour maintenir la température le plus bas possible.

Cette cuve était remplie de neige l’hiver, en ouvrant une trappe au niveau du terrain, par laquelle on la faisait descendre, dans un premier sas, puis on la poussait dans le réservoir sphérique de 33,5 m3 de volume et on la damait très fort pour en faire de la glace. Au pied, un puisard avec grille récupérait les eaux de fonte de neige.

Le réservoir devait être rempli au maximum et les murs tapissés de neige pour permettre dans la partie centrale qui servait de glacière, de stocker victuailles et boissons pendant de nombreux mois, peut-être jusqu’à l’hiver suivant, si les conditions météorologiques le permettaient.

Remerciements à l’association Sath’nâ pour leur aimable autorisation de reproduction